Il était à peu près 15 heures et nous venions Dominique et moi, d’accomplir un périple Pyrénéen dont les contours avaient été élaborés quelques mois auparavant.
C’est à Sarrancolin que nous nous sommes donné rendez-vous. En ce début d’après midi, bien installé dans mon véhicule climatisé je roule en direction des Hautes Pyrénées. Après mon Lot et Garonne natal, je traverse le Gers qui emprunte à la Toscane l’arrondi de ses collines, l’or de ses tournesols et les rangées de Cyprès. Dans ce copier coller italien, même un village répond au doux nom de Fleurance. Le pont n’enjambe pas l’Arno mais la rivière qui a donné son nom au département.
Petit à petit la chaine pyrénéenne apparait et déploie dans le lointain son rempart quelque peu infranchissable. Le plateau de Lannemezan étale ses cours d’eau en direction d’une Garonne qui aime les recevoir. En peu de temps je pénètre dans la vallée. Comme il est de coutume dans les Pyrénées, les torrents sont des gaves mais ici on les nomme des nestes.
Ce soir nous mangeons en terrasse, les plats locaux sont des merveilles que nos papilles dégustent et que nos estomacs emmagasinent, en vue d’un lendemain où la restitution des sucres sera, sans aucun doute aussi lente que notre allure.
Ce matin, sous un ciel bleu et dans une relative fraicheur matinale nous remontons la vallée jusqu’à Arreau. Nous changeons de vallée sur une pente douce, permettant ainsi de prendre part à un échauffement salutaire. Les premières pentes du col finissent par chatouiller nos mollets. A chaque kilomètre des panneaux indiquent le pourcentage moyen de la pente, ça encourage ou ça démoralise.
Dans cet ascenseur émotionnel la nature est un repère vertical. D’abord la forêt, ensuite le pâturage, puis un univers minéral à quelques encablures du sommet. Peyresourde est atteint puis immortalisé par un cliché. Sur la photo, Dominique, plus aventurier que jamais est passé en Haute Garonne alors que prudemment je reste dans les Hautes Pyrénées.
Descendre est un exercice facile mais la prudence est de mise alors que nous pénétrons dans Bordères-Louron afin de faire le plein de caféine. Nous retrouvons Arreau, non pas sur le baudet mais plutôt sur le bidet car pris d’une folle envie d’effectuer une vidange.
Nous attaquons Aspin. Si les deux premiers kilomètres s’effectuent dans une partie boisée le reste du trajet se déroule au soleil. De temps à autre, à la faveur d’un virage, le souffle d’une climatisation passagère est un plaisir que nous partageons au milieu des fougères mais en compagnie des taons.
C’est au mi temps de la journée que nous posons nos roues dans la partie sommitale. Les cyclistes espagnols se disputent la quantité mais pas la qualité avec les vaches et les chevaux sauvages. Face à nous, dans un décor féérique, le pic du Midi saupoudré de neige est un phare pour les alpinistes que nous ne sommes pas.
Reprenant nos montures, nous dévalons la pente en direction de Payolle. Sapin devenu Aspin, nous comprenons pourquoi, tant ce conifère occupe les pentes. Dans le hameau, les motards ont envahi l’espace où les nombreux restaurants n’arrivent pas à déboutonner nos appétits. Nous repartons par un faux plat montant qui contourne le lac. Ici tout est beauté, nous ne restons pas de marbre devant cette carrière qui eu son temps de gloire en ornant les cheminées des belles demeures du sud ouest. Désormais nous serpentons dans un décor sauvage à l’assaut d’une Hourquette qui devrait normalement se déguster dans six ans. L’impression d’avoir privatisé le col est légitime car toute circulation motorisée a quasiment disparu. Les mots nous manquent pour décrire le côté majestueux et grandiose de la montagne. Le sommet est enfin là, alors que quelques campings cars se sont déjà positionnés en vue du prochain passage du Tour de France. Nous dévalons sereinement, sur une route granuleuse, vers une vallée désormais coutumière. Arreau nous propose une coquette gargote où un panini arrosé par les bulles d’un San Pellegrino vient apaiser notre légitime faim.
Rejoindre par une douce inclinaison notre lieu de départ soulage et décrasse nos corps quelque peu endoloris par les récents efforts. Collectionneur de cols dont certains mythiques, de par ma positive altitude, je me réjouis qu’Aspin, Peyresourde et la Hourquette d’Ancizan viennent s’ajouter à ceux déjà vaincus et où se sont écrites certaines légendes.
Le bonheur lié à la réussite de notre projet se mélange à la tristesse d’une séparation, mais une chose est sure, nous recommencerons.
12 et 13 Juillet 2019
Super les copains